samedi 1 octobre 2011

Faut-il craquer pour Lana Del Rey?

A la fin des 400 coups, Jean Pierre Léaud, alors sorti de nulle part, se retournait face caméra et fixait d'un regard incarné, riche de sens et de symbole le spectateur comme s'il lui offrait la promesse d'un changement radical. Celui de sa vie. Celui du cinéma tout entier.
Si tu fais un peu gaffe au clip de Lana Del Rey, tu remarqueras assez rapidement que tous les regards coquins de la belle ne te sont pas destinés. Ce que la "Gangsta Sinatra" regarde, c'est elle. C'est son image sur le combo qui est en train de lui renvoyer ce qu'elle filme. Un peu comme toutes ces gamines sur Facebook qui se prennent en photo à bout de bras, seules dans leur salle de bain, en laissant entrer dans le cadre cette pseudo intimité qui est sensé faire fantasmer (la brosse à dents des parents, un panier de linge sale, une culotte sur le tapis de bain...). Elles se rêvent déjà nouvelle star, mais leur popularité s'arrêtent aux 3 commentaires et 2 "j'aime" de leurs copines qui font exactement la même chose.
On ne sait pas si Lana a des copines mais elle a des fans. Et elle n'a pas fini de les compter. Sa réussite est déjà assurée car elle a parfaitement compris ce qui aller marcher d'ici quelques mois. Forcément, en temps de crise, on a vite fait de trouver du réconfort dans un passé glamour aux fringues so vintage, un ancien temps soi-disant plus agréable à vivre. Toutefois, la belle ne marque pas clairement sa volonté d'y retrouver un bonheur perdu. Ce n'est pas son but à Lana. Car aussi paradoxal que cela puisse paraître, elle est une fille d'aujourd'hui (y a du skate dans ses clips, mec). La réduire à une icône sixties est en outre totalement injustifié tant ses autres titres se rapprochent beaucoup plus de la soupe F.M que d'une ligne de conduite clairement assumée. Lana n'est pas la première à tenter le casse du siècle. Mais d'autres avant elle le firent mieux. En 1999 par exemple, Shivaree avait essayé de relever le pari et s'en était plus ou moins bien tiré.

Las, la pauvre blondinette transforme la suite de son répertoire en du sous Brit-Brit (guette bien la 35ème seconde de son craignos Blue Jeans) tant et si bien qu'on arrive à se demander s'il s'agit bien de la même gonzesse. Avec intelligence, elle vient ôter le doute et prouver qu'il n'y a pas erreur sur la marchandise en refaisant le même clip que le précédent à base d'extraits vidéos défraîchis sans doute piqués au petit bonheur la chance sur Youtube.

Néanmoins, faut bien le reconnaître, la chanson "Video Games" est magnifique, avec juste ce qu'il faut d'envolées lyriques et de retenues sauvages mais tout sonne faux. L'utilisation des images d'archives, les moues boudeuses, ce qu'elle raconte. Là où Nancy Sinatra retournait les chairs et glaçait les sangs avec son "Bang Bang" en habitant véritablement sa chanson, Lana Del Rey préfère prendre la pose dans son délire de control-freak. Elle fabrique son propre mythe, sa propre histoire au lieu de la vivre. En soi, ce n'est pas fondamentalement nouveau ni même dérangeant. Certains y sont très bien arrivés comme ça. Bowie en tête. Sauf que Bowie a su sans cesse se réinventer. Et ce qui semble perdu d'avance chez Lana Del Rey, c'est justement cette capacité à transcender son personnage, à déconstruire son image pour ne garder que l'essentiel: la musique.




2 commentaires:

  1. Remarquable chronique, cher ami : j'ai adoré...

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  2. Non, sans blagues, il s'agit bien d'une actrice porno qui croit pouvoir et devoir se reconvertir dans la chanson, non ?

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